La Commission européenne a dévoilé un plan d'action visant à propulser l'Europe au rang de leader mondial de l’intelligence artificielle (IA). Ce plan, annoncé le 9 avril 2025, comprend des mesures pour développer l'infrastructure, faciliter l'accès aux données, stimuler l'adoption de l'IA, renforcer les compétences et clarifier la réglementation.
Alors que la concurrence mondiale s’intensifie dans le secteur de l’intelligence artificielle (IA), la Commission européenne a élaboré un nouveau plan d’action dans le but soutenir l’innovation tout en encadrant les usages. Ce plan s'articule qui vise à transformer le paysage industriel européen, s’articule autour de cinq axes principaux misant sur l’infrastructure, l’accès aux données, l’adoption de l’IA, les talents et la régulation.
Supercalculateurs et « giga-usines » : une course aux infrastructures
Le premier axe du plan repose sur le déploiement massif de capacités de calcul. Treize usines d’IA sont déjà intégrées aux supercalculateurs européens, et cinq « giga-usines » ou « gigausines », pourraient voir le jour, alimentées par quelque 100 000 puces IA chacune. Une puissance destinée à concurrencer les plateformes américaines et chinoises.
Ce virage vers une IA « souveraine » implique des investissements publics et privés à hauteur de 20 milliards d’euros via l’initiative InvestAI. Reste à voir si les financements privés suivront, dans un contexte technologique largement dominé par des acteurs extra-européens.
Un marché européen de la donnée encore hypothétique
Deuxième chantier : l’accès à des données massives et de qualité, indispensable à l’entraînement des modèles IA. Pour cela, la Commission entend structurer des « laboratoires de données » et une « union des données » d’ici fin 2025. Si la volonté de créer un marché intérieur des données est réaffirmée, les obstacles techniques, juridiques et politiques à leur mutualisation entre États membres restent un défi non négligeable.
Adoption de l'IA dans les secteurs stratégiques
La Commission européenne a constaté que l'adoption de l'IA par les entreprises de l'UE est relativement faible. Malgré le potentiel de l'IA, seulement 13,5 % des entreprises de l'UE l'ont adoptée. Le troisième piller du plan de la Commission consiste donc à lancer le programme «Appliquer l'IA» pour encourager l'adoption de l'IA dans les secteurs stratégiques de l'UE, en s'appuyant sur les infrastructures d'innovation existantes.
Répondre à la pénurie de talents
Le quatrième axe vise à former davantage de spécialistes de l’IA et à attirer des experts étrangers. Pour répondre à la demande croissante de professionnels de l'IA, la Commission européenne prévoit de faciliter le recrutement international de talents hautement qualifiés. Des initiatives telles que le réservoir de talents, l'action Marie Skłodowska-Curie « MSCA Choose Europe » et les programmes de bourses de la future AI Skills Academy seront mises en place. En outre, des programmes d'éducation et de formation sur l'IA et l'IA générative seront développés
Mais dans un contexte global de compétition féroce pour les compétences, l’Europe devra parvenir à séduire les profils les plus convoités. L’enjeu de la rétention des talents européens reste aussi entier.
Une régulation encore en chantier
Enfin, le cinquième chantier du plan d’action vise à en faire un outil de clarification réglementaire. En effet, la Commission européenne considère que la législation sur l'IA est essentielle pour instaurer la confiance dans cette technologie et offrir un cadre juridique aux investisseurs et aux entreprises. Pour faciliter la conformité avec cette législation, elle lancera donc le service d'assistance «Législation sur l'IA», qui fournira des informations et des orientations aux entreprises.
Reste à savoir si la complexité du droit européen, combinée à la vitesse d’évolution des technologies, ne limitera pas l’efficacité de ces outils. Les retours attendus des consultations publiques seront déterminants.
Consultations publiques et prochaines étapes
La Commission lance aussi deux consultations publiques pour recueillir les commentaires des parties prenantes et comprendre les blocages afin d’ajuster les dispositifs européens relatifs à l’IA.
Ces consultations sont ouvertes jusqu’au 4 juin 2025. L’une concerne l’adoption de l’IA dans les secteurs économiques (stratégie « Appliquer l’IA »), destinée à recenser les priorités, obstacles et besoins supplémentaires. Et l’autre se rapporte à la future loi sur le développement de l’informatique en nuage et de l’IA, notamment pour encourager les investissements privés dans les centres de données.
Les résultats de ces consultations serviront à affiner les orientations du plan d’action.
À noter qu’une troisième consultation publique sur la stratégie pour une union des données sera lancée en mai. Des dialogues avec des représentants de l'industrie et du secteur public seront également organisés
En définitive, le plan d’action sur l’IA pose des jalons clairs, mais son succès dépendra de l’exécution, de la mobilisation des financements privés et de la capacité à faire coopérer les États membres.
Samorya Wilson
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