Harcèlement moral : preuve par un enregistrement réalisé à l'insu de l'employeur

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Le juge ne peut écarter la production de l'enregistrement de l'entretien, effectué à l'insu de l'employeur, sans vérifier si cet enregistrement est indispensable à l'exercice du droit à la preuve du harcèlement moral allégué et, dans l'affirmative, si l'atteinte au respect de la vie personnelle de l'employeur n'est pas strictement proportionnée au but poursuivi.

Une salariée a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant au paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral et licenciement abusif.

La cour d'appel de Montpellier l'a déboutée de ses demandes.
Elle a retenu que, dans la mesure où, contrairement à ce que soutient la salariée, elle avait d'autres choix que d'enregistrer l'entretien avec son employeur pour prouver la réalité du harcèlement subi depuis plusieurs mois, cet enregistrement clandestin, contraire au principe de la loyauté dans l'administration de la preuve, doit être écarté des débats, l'atteinte portée aux principes protégés en l'espèce n'étant pas strictement proportionnée au but poursuivi.

Dans un arrêt du 10 juillet 2024 (pourvoi n° 23-14.900), la Cour de cassation rappelle qu'il résulte des articles 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, 9 du code de procédure civile, L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, que la preuve du harcèlement moral ne pèse pas sur le salarié.

La cour d'appel a violé les textes susvisés en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il lui appartenait de vérifier si la production de l'enregistrement de l'entretien, effectué à l'insu de l'employeur, était indispensable à l'exercice du droit à la preuve du harcèlement moral allégué, au soutien duquel la salariée invoquait, au titre des éléments permettant de présumer l'existence de ce harcèlement, les pressions exercées par l'employeur pour qu'elle accepte une rupture conventionnelle, et, dans l'affirmative, si l'atteinte au respect de la vie personnelle de l'employeur n'était pas strictement proportionnée au but poursuivi.