Le prélèvement à la source confronte le dirigeant d’entreprise à une double difficulté : technique bien entendu, mais également relationnelle, puisqu’il faut assurer la communication du nouveau dispositif aux salariés. Alors, comment procéder ? Pierre Godet, Directeur du bureau Sadec-Akelys de Paris, livre un éclairage à ce sujet. Première partie…
La mise en place du prélèvement à la source à partir du 1er janvier 2019 est une modification profonde de notre système de paiement de l’impôt sur le revenu dont les principaux objectifs sont les suivants :
• supprimer le décalage d’un an entre la perception des revenus et leur imposition ;
• améliorer la répartition de l’impôt dans l’année et permettre une adéquation plus efficace entre revenus et imposition ;
• maintenir les règles de calcul et de déclaration.
Le système met l’entreprise au cœur du dispositif en l’instituant une nouvelle fois collecteur de l’impôt, l’administration fiscale restant l’interlocuteur direct du contribuable.
Cette organisation tripartite (contribuable - administration fiscale - entreprise) conduit à l’évidence à complexifier les rapports au sein de l’entreprise et modifie les relations entre le dirigeant et le salarié. Cette situation conduit le chef d’entreprise à assumer une double responsabilité :
• une responsabilité technique : il appartient à la structure d’adapter son organisation, son système d’information et ses applicatifs de paie aux nouvelles contraintes ;
• et une responsabilité relationnelle : le dirigeant se positionne comme un relais entre l’administration fiscale et le salarié contribuable, sur un double plan : celui de l’information et celui du recouvrement de l’impôt.
Dans cette situation, comment le chef d’entreprise doit-il communiquer auprès des salariés ?
La première obligation du chef d’entreprise est un devoir d’information générale, celui de faire connaître aux salariés les grandes lignes de la réforme du prélèvement à la source
L’administration fiscale est en principe responsable de cette information et le contribuable peut trouver sur le site officiel plusieurs livrets qui présentent de manière assez détaillée les principaux aspects. Il appartient tout d’abord au chef d’entreprise de veiller à ce que chaque salarié ait pu prendre connaissance de ces informations officielles. Mais ces renseignements, aussi bien présentés soient-ils, appellent des commentaires et des précisions que le dirigeant est amené à fournir, en appui de ce dispositif général.
Il s’agit en particulier :
• de l’assiette du prélèvement (frais professionnels, abattements spécifiques, revenus exonérés…) ;
• de la détermination du taux (taux propre, taux neutre, taux individualisé) et des possibilités de modulation ;
• des modalités de neutralisation de l’année 2018 et du fonctionnement du crédit d’impôt modernisation.
La première question de base qui se pose aux salariés est celle du mécanisme général et de la future structure du bulletin de paie.
À compter de janvier 2019, le montant de l’impôt sur le revenu sera déduit du salaire comme le sont déjà aujourd'hui les cotisations sociales et le salarié percevra un salaire net d'impôt. Le montant prélevé sera déterminé en appliquant au salaire net imposable le taux qui aura été communiqué à l’employeur par l'administration fiscale. Le bulletin de salaire mentionnera le taux du prélèvement, son montant et le salaire net avant et après prélèvement.
Il ne s’agit pas simplement d’une mensualisation du paiement telle qu’elle peut être effectuée actuellement. En outre, le prélèvement à la source ne se substitue en aucun cas à la déclaration annelle des revenus, qui devra être effectuée par chaque salarié directement auprès des services des impôts (obligatoirement par internet). Il ne supprime pas non plus l’obligation de paiement du solde éventuel dans lequel l’entreprise n’intervient pas.
Le salarié doit aussi être informé du calendrier des opérations préparatoires en 2018 puisque dès à présent, les contribuables commencent à recevoir leur déclaration papier avec la mention du taux.
Le deuxième axe de communication est l’explication du rôle de l’entreprise et du caractère confidentiel de l’information détenue
Il convient de rappeler également quel est le rôle de collecteur de l’entreprise et quelles en sont les limites ; c’est l’administration fiscale qui reste l’interlocutrice du contribuable :
• elle calcule le taux du prélèvement et le communique au tiers versant les revenus (employeurs privés ou publics, caisses de retraite, etc.) ;
• elle est seule destinataire des éventuelles demandes de modulation de taux d’imposition exprimées par les contribuables ;
• elle reçoit les déclarations de revenus des contribuables, comme aujourd’hui ;
• elle calcule le montant final de l’impôt ;
• elle reçoit enfin le paiement du solde d’impôt ou procède à la restitution d’un éventuel trop-versé.
Le rôle de l’entreprise est limité à la collecte des informations, au calcul du prélèvement et à son reversement.
Pierre Godet, Directeur du bureau Sadec-Akelys de Paris